
Mais l’aventure spirituelle ne s’arrête pas à l’échec de ce «premier contact».
Quand bien-même nous nous serions ou sommes éloignés de Lui, le Seigneur n’abandonne pas la partie : il part immédiatement nous (re)chercher… Quelque soit le lieu ou la distance de nos éloignements. Cela se donne à entendre dès le récit de la Genèse :
«Où es-tu?» (Genèse 3,9)
A travers toute l’Histoire de l’humanité, Dieu ne cesse de re-chercher l’Homme. Pour cela Dieu se met lui-même en mouvement : c’est ce que découvrira Moïse dans sa rencontre fondamentale près du buisson ardent :
«J’ai vu, oui, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte, et j’ai entendu ses cris sous les coups des surveillants. Oui, je connais ses souffrances. Je suis descendu pour le délivrer.» (Exode 3, 7-8).
Cette mise en mouvement de Dieu vers l’Homme s’appelle la Miséricorde. C’est ce qu’enseignera Jésus lui-même et qu’il manifestera dans sa manière de vivre. C’est précisément 4 de ses enseignements et rencontres qui sont précisément figurés ici, accrochés au mur, sur des «corbeaux», entre les premiers vitraux. Ces sculptures servent de base à des arcs brisés qui semblent nous (re)conduire au centre de la nef. Ainsi, alors que symboliquement nous étions comme repartis dehors, l’expérience de la miséricorde vient nous (re)saisir et nous ramène de l’extérieur vers l’intérieur de la chapelle.

Parabole de la brebis perdue et retrouvée par le bon pasteur
(Lc 15, 4-6 + Jn 10, 10-16)

Rencontre de Jésus avec la femme pécheresse chez Simon le pharisien
(Lc 7, 36-50)

Parabole du père prodigue avec le retour du fils cadet
(Lc 15, 11-32)

Rencontre de Jésus avec la Samaritaine au bord du puits
(Jn 4, 5-29)
Cette expérience de la miséricorde du Seigneur rappelle celle que fera Claude La Colombière lui-même à un moment où il est en cheminement intérieur de conversion.
Nous sommes à la fin de l’année 1674, sur la presqu’île de Lyon, proche de l’abbaye d’Ainay, alors qu’il fait la grande retraite des Exercices Spirituels d’Ignace de Loyola pour achever son parcours de formation jésuite, 15 ans après son entrée au noviciat, début de sa vie religieuse. L’ambiance religieuse de cette époque est fortement marquée par le jansénisme, doctrine déviante du christianisme développant la perception d’un Dieu lointain, dur, où le salut ne semble être accessible qu’à un petit nombre.
Claude vient de vivre pendant plusieurs jours des méditations sur sa vie et son expérience de pécheur, c’est à dire son éloignement de Dieu. Et voilà ce qu’il expérimente (extraits de ses notes spirituelles) :
«Dans la vue de mes désordres, à la confusion que j’en ai conçue a succédé une douce pensée, que c’était là une grande matière pour Dieu d’exercer sa miséricorde, et une espérance très ferme qu’il se glorifiera en me pardonnant. « Cette espérance est déposée en mon cœur » (Job 19, 27)Cette espérance est si fort établie en mon cœur, qu’il me semble qu’avec la grâce de Dieu on m’arrachera plutôt la vie que ce sentiment.»
«Songeant à ce qui fait de la peine à la mort, qui sont les péchés passés et les peines à venir, il s’est d’abord présenté ceci à mon esprit, que j’ai embrassé de tout mon cœur et avec une très grande consolation de mon âme : c’a été qu’à ce dernier moment, de tous les péchés qui se présenteront à mon esprit, soit connus, soit inconnus, j’en ferai comme un fagot que je jetterai aux pieds de notre Sauveur, pour être consumé par le feu de sa miséricorde; plus le nombre en sera grand, plus ils me paraîtront énormes, d’autant plus volontiers les lui offrirai-je à consumer, parce que ce que je lui demanderai sera d’autant plus digne d’elle. Il me semble que je ne saurais rien faire de plus raisonnable.»